Vérification des contrats de services professionnels

Octobre 2016
Rapport final

Table des matières

  1. Acronymes et abréviations
  2. Sommaire Exécutif
  3. Réponse de la gestion à la vérification
  4. 1. Contexte
  5. 2. Objectif, portée, méthode et énoncé de conformité
  6. 3. Constatations
  7. 4. Recommandations
  8. 5. Conclusion
  9. Annexe A – Objectif et critères de vérification

Acronymes et abréviations

AQC
Assurance de la qualité des contrats
AMF
Autres ministères fédéraux
AT
Autorisation de tâches
BC
Bon de commande
COC
Convention d'offre à commandes
CT
Conseil du Trésor
DPFA
Dirigeant principal des finances et de l'administration
GI-TI
Gestion de l'information et technologie de l'information
GRC
Gendarmerie royale du Canada
LGFP
Loi sur la gestion des finances publiques
SDAM
Sous-direction des acquisitions et des marchés
SIGRH
Système d'information sur la gestion des ressources humaines
SPAC
Services publics et Approvisionnement Canada
SYSTÈME TEAM
Système de gestion des dépenses globales et des actifs
TI
Technologie de l'information
TPSGC
Travaux publics et Services gouvernementaux Canada

Sommaire exécutif

Afin de s'acquitter de son mandat, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) engage des personnes et des firmes qui lui fournissent une assistance spécialisée dans plusieurs domaines comme les services juridiques, les technologies et la gestion de l'information, la traduction, l'entretien et la gestion des biens immobiliers, la formation, les services de santé, la sécurité, les services de conseils et les services administratifs. Selon les données contenues dans le Système de gestion des dépenses globales et des actifs (système TEAM), la GRC a dépensé quelque 419 M$ pour obtenir ces types de services professionnels durant l'exercice 2014-2015. De ce chiffre, 252 M$ sont allés à des fournisseurs de services qui ne font pas partie du gouvernement fédéral, dont des travailleurs autonomes, des firmes indépendantes, d'autres ordres de gouvernement et des organisations partenaires.

En juillet 2015, le commissaire de la GRC a approuvé le Plan de vérification axé sur les risques 2015-2018, qui comprend une vérification des contrats de services professionnels en vue d'évaluer si le recours à des ressources contractuelles est rentable et conforme à la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor (CT), au Règlement sur les marchés de l'État et aux, directives, procédures et politiques sur les marchés de la GRC. La vérification a porté sur des contrats de services professionnels passés avec des fournisseurs externes, dans l'ensemble du pays, d'avril 2012 à août 2015. Dans les cas où Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) était l'autorité contractante, on n'a pas examiné les activités telles que l'attribution des contrats, la sélection des fournisseurs et l'évaluation des soumissions puisque cela relevait de SPAC. La vérification ne portait pas non plus sur les ententes, notamment sur les niveaux de service, et les protocoles d'entente conclus entre la GRC et d'autres ministères fédéraux (AMF) ou administrations publiques comme les municipalités, les provinces ou les gouvernements étrangers pour la fourniture de services professionnels.

La vérification a montré que l'établissement de deux organes de supervision (le programme d'assurance de la qualité des contrats et le comité de révision des marchés) a permis d'accroître le taux de conformité aux lois, aux politiques et aux règlements applicables. Toutefois, la planification, le contrôle et la supervision de la contractualisation des services professionnels peuvent encore être améliorés. Afin de gérer les fonds publics le plus efficacement possible, la GRC doit : bien connaître la nature et l'étendue de ses ressources contractuelles; effectuer régulièrement une évaluation documentée des solutions de rechange; et examiner les risques, les avantages et les coûts de la contractualisation par rapport à d'autres moyens de satisfaire les besoins. Par ailleurs, on recommande d'effectuer un contrôle axé sur le risque des paiements effectués sans référence à un bon de commande dans le système TEAM afin d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix et garantir un processus de contractualisation équitable, ouvert et transparent. Enfin, en définissant clairement les exigences de gestion de l'information concernant les contrats de services professionnels et en mettant en œuvre une approche cohérente en matière de collecte et de mise à jour de l'information et de tenue de la base de données connexes, la GRC pourra mieux déterminer les risques, analyser les tendances et les solutions de rechange et cerner les moyens de réaliser des économies.

La réponse de la direction incluse dans le présent rapport témoigne de la détermination de la direction à donner suite aux conclusions et recommandations découlant de la vérification. La direction travaille d'ailleurs à l'élaboration d'un plan d'action détaillé à cette fin. Lorsqu'il sera approuvé, la Vérification interne de la GRC surveillera sa mise en œuvre et fera, au besoin, une vérification de suivi.

Réponse de la gestion à la vérification

La vérification des contrats des services professionnels a mis en évidence la possibilité de renforcer la planification, l'acquisition et l'utilisation de services professionnels afin de répondre aux besoins opérationnels de la GRC.

Les responsabilités liées aux acquisitions et à la contractualisation des services professionnels sont partagées entre Gestion générale et Contrôle et les secteurs d'activité auxquels celle-ci apporte son soutien. Les différents secteurs de programme ou d'activité planifient et utilisent les services professionnels, tandis que Gestion générale et Contrôle agit comme centre de décision concernant les services des Acquisitions et Marchés et fournit des services de passation de marchés aux secteurs d'activité.

La Gestion générale accueille les conclusions de la vérification qui serviront à renforcer encore davantage la prestation de services d'acquisition et de passation de marchés et à améliorer ses politiques et son programme d'assurance de la qualité des contrats fondé sur les risques.

La Gestion générale s'engage à élaborer un plan d'action détaillé qui comprendra un calendrier et des jalons précis auxquels la GRC se tiendra.

Dennis Watters,
Dirigeant principal intérimaire des Finances et de l'Administration

1. Contexte

En juillet 2015, le commissaire de la GRC a approuvé le Plan de vérification axé sur les risques 2015-2018, qui comprend une vérification des contrats de services professionnels. Afin de s'acquitter de son mandat, la GRC engage des personnes et des firmes qui lui fournissent une assistance spécialisée dans des domaines comme les services juridiques, les technologies et la gestion de l'information, la traduction, l'entretien et la gestion des biens immobiliers, la formation, les services de santé, la sécurité, les services de conseils et les services administratifs. Ces services, appelés collectivement « services professionnels », sont obtenus auprès d'AMF, d'organismes partenaires, dont des corps policiers, et en passant des marchés avec des personnes, des firmes ou des agences d'aide temporaire.

Conformément à la Politique sur les marchés du CT du Canada, la contractualisation des services est vue comme un moyen efficace de répondre aux fluctuations imprévues de la charge de travail, d'acquérir une expertise pointue non disponible à l'interne, ou encore de remplacer des fonctionnaires durant une absence temporaire dans certaines circonstancesNote de bas de page 1.

La Loi sur l'emploi dans la fonction publique prévoit également des mécanismes pour combler les besoins particuliers et à court terme. Il faut donc prendre soin de choisir la solution appropriée - dotation ou contractualisation – afin d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix.

La contractualisation des services professionnels offre plusieurs avantages : il faut moins de temps et d'efforts pour trouver et engager un entrepreneur expérimenté que pour recruter et former un nouvel employé; cela procure une plus grande souplesse puisqu'on n'a pas d'obligation envers l'entrepreneur une fois le contrat terminé; les organisations ont accès à un éventail d'expertise et de compétences qu'elles ne possèdent pas nécessairement à l'interne.

Cependant, la contractualisation comporte aussi des risques : le développement potentiel d'une relation employé-employeur; la perte de savoir collectif lorsqu'on s'appuie trop longtemps sur un entrepreneur; l'absence de continuité si l'entrepreneur quitte sans que la relève ait été soigneusement planifiée; la baisse du moral des employés qui possèdent des compétences similaires à celles d'un entrepreneur; et des pratiques de passation des marchés inadéquates (fractionnement d'un contrat, p. ex.) et donc non conformes aux lois, règlements et politiques du gouvernement. Par ailleurs, à la longue, les ressources contractuelles peuvent coûter plus cher que des employés. L'Introduction à la politique d'acquisition et de marchés de la GRC fait état de ces risques et souligne que les gestionnaires et le personnel chargé de la passation des marchés doivent en être bien conscientsNote de bas de page 2.

Durant l'exercice 2014-2015, la GRC a dépensé quelque 419 M$ en services professionnels. De ce chiffre, environ 167 M$ sont allés à d'autres ministères fédéraux (AMF) qui ont fourni des services interministériels, dont des services de traduction fournis par Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC), anciennement Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC), et des services juridiques fournis par Justice Canada. Les 252 M$ restants ont été versés à des fournisseurs de services qui ne font pas partie du gouvernement fédéral, notamment en vertu d'ententes de services conclues avec d'autres ordres de gouvernement (provinciaux ou municipaux) ou des organisations partenaires. Le reste (sur lequel porte la présente vérification) découlait de marchés conclus avec des firmes ou des travailleurs autonomes. Le tableau ci-dessous présente la ventilation des 252 M$ versés à des fournisseurs non gouvernementaux par type de service professionnel obtenu :

Le texte qui accompagne le graphique se trouve après l'image.

Répartition des dépenses en services professionnels effectuées auprès de fournisseurs externes en 2014-2015, selon
Services-systèmes de radiocommunications Services de GI-TI Services juridiques Biens immobiliers-services contractuels Formation et sèminaires Services de santè Corps des commissionaires Autres services professionels
$23.1M (9%) $31.4M (12%) $2M (1%) $22.2M (9%) $7.2M (3%) $5.3M (2%) $49.4M (20%) $111.4M (44%)

L'analyse des données du système TEAM sur les contrats de services professionnels attribués à des fournisseurs externes pour la période du 1er avril 2012 au 18 août 2015 montre que :

  • SPAC était l'autorité contractante pour 17,7 % (50 318 033 $) du montant total des contrats de services professionnels et la GRC, pour 82,3 % (234 117 431 $).
  • 83,3 % (236 945 658 $) de la valeur totale des contrats de services professionnels ont été passés en recourant au processus concurrentiel et 16,7 % (47 489 805 $) sans processus concurrentiel.

Le Guide d'introduction à la politique d'acquisition et de marchés de la GRC fournit un aperçu du processus d'acquisition et définit les rôles et responsabilités de chaque entité qui participe à l'acquisition des services :

  • La Sous-direction des acquisitions et des marchés (SDAM) est le centre de décision en matière d'acquisitions et de passation des marchés à la GRC. C'est aussi le centre d'expertise chargé d'élaborer les politiques, de fournir des conseils et d'établir un cadre de contrôle pour les acquisitions et les marchés. Elle veille à la formation et à la certification des spécialistes en acquisitions; à l'élaboration, la mise en œuvre et le contrôle des acquisitions nationales; au contrôle des activités relatives aux acquisitions et à la passation des marchés; à l'assurance de la qualité des contrats; et à la liaison avec les organismes centraux et SPAC. La SDAM relève du Dirigeant principal des Finances et de l'Administration (DPFA) de la GRC.
  • Le client est chargé de cerner les besoins de son service, d'évaluer le meilleur mécanisme de prestation (contractualisation ou dotation) et de rédiger et de présenter une demande de service lorsque c'est nécessaire. Si le service concerne un projet, le client doit : s'assurer que ce dernier se situe dans les limites des pouvoirs d'approbation qui lui ont été délégués et que toutes les autorisations ont été obtenues (p. ex. dans le cas des projets de TI conformément aux exigences du Manuel de la gestion de l'actif de la GRC); fournir et autoriser les fonds nécessaires à l'acquisition; rédiger l'énoncé des travaux et établir les exigences; élaborer les critères d'évaluation technique et participer au processus d'approbation du projet (évaluation technique); accepter le service et surveiller la « livraison technique » du service tant que le contrat est en vigueur.
  • Les groupes des Acquisitions régionaux ou de la DG gèrent le processus d'acquisition général à titre d'autorité en la matière, notamment : aider les clients à clarifier leurs besoins; déterminer la méthode ou approche appropriée pour procéder à l'acquisition; tenir et maintenir les dossiers et données nécessaires, faire un appel d'offres, évaluer les soumissions, attribuer les marchés, consigner l'information financière dans le système TEAM, résoudre les problèmes avec l'entrepreneur et clore le dossier. Ce sont les principaux points de contact de SPAC pour les acquisitions pilotées par SPAC.
  • La Sous-direction des finances consigne les données financières dans le système TEAM; traite les comptes fournisseurs conformément à l'article 33 de la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP); fournit du financement pour les opérations et traite toute présentation nécessaire au CT.
  • SPAC s'occupe des différents aspects de l'acquisition de servicesNote de bas de page 3 pour les opérations qui dépassent les pouvoirs de passation des marchés de la GRC ou pour lesquelles la GRC a choisi d'engager ses services.

2. Objectif, portée, méthode et énoncé de conformité

2.1 Objectif

La vérification visait à évaluer si le recours par la GRC à la contractualisation des services professionnels est rentable et conforme à la Politique sur les marchés du CT, au Règlement sur les marchés de l'État et aux politiques, directives et procédures de passation des marchés de la GRC.

2.2 Portée

La vérification a porté sur les marchés de services professionnels passés avec des fournisseurs externes, dans l'ensemble du pays, d'avril 2012 à août 2015. Dans certains cas, on a examiné des données historiques afin d'avoir un portrait complet des sommes dépensées pour obtenir les services de certains entrepreneurs engagés pour une durée allant au-delà de la période couverte par le présent rapport. Dans les cas où SPAC était l'autorité contractante, on n'a pas examiné les activités telles que l'attribution des contrats, la sélection des fournisseurs et l'évaluation des soumissions puisque cela relevait de SPAC.

La vérification ne portait pas non plus sur les ententes, notamment sur les niveaux de service, et les protocoles d'entente conclus entre la GRC et des AMF ou administrations publiques comme les municipalités, les provinces ou les gouvernements étrangers pour la fourniture de services professionnels

2.3 Méthode

La planification de la vérification s'est terminée en janvier 2016. Durant cette phase, l'équipe de vérification a procédé à des entrevues, passé en revue les processus et examiné les politiques, les directives et les procédures pertinentes, ainsi que les bulletins de la GRC et les résultats de vérifications antérieures.

Les critères de vérification et les procédures d'évaluation ont été élaborés à partir des sources suivantes : le Guide d'introduction à la politique d'acquisition et de marchés de la GRC, le Manuel de la gestion de l'actif de la GRC, les Lignes et pratiques exemplaires en matière d'assurance de la qualité des contrats de la GRC, la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor, les Lignes directrices sur la divulgation proactive des marchés du Conseil du Trésor, le Guide des approvisionnements du gouvernement du Canada, la Ligne directrice sur le processus opérationnel commun en gestion financière 3.1 - gestion du cycle de l'approvisionnement au paiement, ainsi que les critères de l'Agence du revenu du Canada visant à déterminer la relation employé-employeur. L'objectif et les critères de la vérification figurent à l'annexe A.

Pour la phase d'examen, qui s'est terminée en mai 2016, les vérificateurs ont employé diverses techniques : entrevues, analyse de données, examen de dossiers et de la documentation à l'appui, schématisation de processus et vérifications détaillées. À cette étape, on a extrait des données du système TEAM (marchés attribués, modifications apportées aux contrats et paiements inscrits sans référence à un bon de commande, p. ex.) et du Système d'information sur la gestion des ressources humaines (SIGRH) (pour la liste des consultants engagés). L'analyse de données a servi à repérer les aspects susceptibles de présenter des risques en fonction de facteurs tel le nombre d'opérations effectuées dans un service particulier; la valeur de chaque contrat; le type et la durée des contrats; le type de processus de demandes de soumissions; le nombre de modifications; les fournisseurs récurrents et les paiements susceptibles d'indiquer un fractionnement de contrat. Sur la base des résultats de l'évaluation des risques, on a procédé à un échantillonnage aléatoire de 72 contrats parmi les plus risqués. De plus, après avoir analysé la valeur et la fréquence des contrats de services professionnels par division, on a interviewé ceux qui y recouraient le plus afin d'obtenir des renseignements contextuels.

En plus de l'examen des dossiers de contrat et des entrevues, nous avons combiné l'analyse des données aux vérifications détaillées des paiements effectués durant l'exercice 2015 pour des services professionnels sans référence à un bon de commande dans le système TEAM. L'analyse des données portait plus particulièrement sur les montants supérieurs à 10 000 $, ainsi que les paiements fréquents faits aux mêmes fournisseurs quels qu'en soient les montants. Pour les vérifications détaillées, on a établi cinq catégories de fournisseurs qui ont été payés sans référence à un bon de commande : le Corps des commissionnaires, les provinces, les municipalités, d'autres corps policiers et d'autres fournisseurs externes. On a ensuite sélectionné un échantillon discrétionnaire de 49 opérations de paiement dans ces cinq catégories.

À l'issue de la phase d'examen, l'équipe de vérification a tenu des réunions afin de valider ses constatations auprès du personnel et a présenté les conclusions pertinentes à la haute direction.

2.4 Énoncé de conformité

La mission de vérification est conforme aux Normes de vérification interne du gouvernement du Canada, comme en font foi les résultats du programme d'assurance et d'amélioration de la qualité.

3. Constatations

3.1 Utilisation et coût des contrats de services professionnels

La GRC utilise les contrats de services professionnels conformément aux critères énoncés dans la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor; cependant, elle pourrait améliorer la manière dont les dossiers sont documentés afin de démontrer plus clairement que tous les autres moyens de satisfaire les besoins ont été envisagés et qu'une analyse comparative coûts-avantages a été réalisée.

La contractualisation des services professionnels est vue comme un moyen efficace de répondre aux fluctuations imprévues de la charge de travail, d'acquérir une expertise pointue non disponible à l'interne, ou encore de remplacer des fonctionnaires durant une absence temporaire dans certaines circonstancesNote de bas de page 4. Dans le cadre de notre examen des contrats de services professionnels et en conformité avec la Politique sur les marchés du CT, nous nous attendions à ce que :

  • les raisons du recours à des contrats de services professionnels soient précisées et documentées;
  • une analyse exhaustive des solutions de rechange, qui ne se limite pas au processus d'acquisition, soit effectuée à l'étape de la planification et soit versée au dossier;
  • les besoins opérationnels à long terme de la GRC soient pris en compte à l'étape de la planification des ressources, de manière à combiner, de façon optimale, ressources internes et contractuelles;
  • la décision d'engager des prestataires de services professionnels soit fondée sur une analyse adéquate et l'évaluation des avantages, des coûts et des risques;
  • des procédures soient en place pour garantir un financement initial adéquat et une planification préalable avant même de passer un marché ou d'autoriser une tâche.

Justification du recours à des contrats de services professionnels

Durant l'exercice 2014-2015, la GRC a dépensé 252 M$ en contrats de services professionnels destinés à appuyer l'exécution de programmes. Étant donné l'importance de cette dépense récurrente, il importe que les décisions de passation de marchés soient le résultat d'une démarche rationnelle comprenant :

  • l'évaluation documentée des options ou solutions de rechange pour obtenir le service;
  • un processus visant à dresser l'éventail des compétences disponibles à l'interne et à les évaluer au regard des exigences de service avant la contractualisation et dans le cadre du processus de planification de la relève.

Des discussions que nous avons eues avec les gestionnaires de service, il ressort que les contrats de services professionnels sont utilisés pour satisfaire les trois conditions prévues dans la Politique sur les marchés du CT, à savoir : obtenir les services d'experts techniques (en technologies de l'information (TI), services de santé, expertise-conseil, formation linguistique, etc.), lorsque des fluctuations imprévues dans la charge de travail dépassent la capacité interne (TI, services de laboratoire) et pour pallier des absences à court terme (contrats d'aide temporaire, qui ne sont plus beaucoup utilisés à la GRC depuis les dernières années).

Deux formulaires ont été créés pour justifier l'attribution de contrats de services professionnels. L'un concerne les biens et services de TINote de bas de page 5et l'autre, les services d'aide temporaireNote de bas de page 6. Cependant, aucun des dossiers examinés dans le cadre de la vérification ne contenait ces formulaires ou d'autres documents expliquant les raisons de la contractualisation. Or, sans documentation, il est difficile de s'assurer que d'autres solutions ont été envisagées et que les critères du CT concernant le recours aux contrats de services professionnels ont bien été satisfaits.

Planification des ressources humaines

Pour être certains d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix, les gestionnaires doivent procéder à l'analyse exhaustive des coûts-avantages généraux des différents moyens d'obtenir les services professionnels recherchés. Outre les coûts, l'analyse doit également porter sur le transfert des connaissances, le développement des compétences, la planification de la relève, les risques liés à la continuité du service, ainsi que l'importance critique des services. Documenter cette analyse dans les dossiers d'acquisition contribuerait à faire la preuve que des solutions de rechange ont été envisagées et qu'on a conclu que le recours à des entrepreneurs externes constituait la meilleure option.

La GRC recourt actuellement à des entrepreneurs pour compléter son effectif dans différents domaines, tels la sécurité, les TI, les services de santé et la formation linguistique. Or, aucun processus formel n'a été mis en place pour documenter le fait que des solutions de rechange à la contractualisation ont bien été envisagées et que cette dernière constitue la meilleure option. Aucun des dossiers examinés dans le cadre de la vérification ne contenait de document montrant que des solutions de rechange à la contractualisation avaient été envisagées ou qu'une analyse comparative des coûts, risques et avantages avait été effectuée. Or, faute de documentation suffisante au dossier, il est difficile de déterminer si la contractualisation offre le meilleur rapport qualité-prix à la GRC. Il est donc important d'évaluer les coûts, les avantages et les risques au niveau des services ou de l'organisation, car un examen au cas par cas des contrats n'offre pas un portrait complet de la situation.

Durant les entrevues, les gestionnaires ont mentionné qu'il n'existait pas de répertoire complet et fiable des habiletés et compétences que possèdent les employés de la GRC. Par ailleurs, bien que chaque gestionnaire de projets ait sa propre liste manuscrite d'entrepreneurs, il n'existe pas, dans les systèmes de la GRC, de base de données complète et à jour sur les consultants engagés et en exercice. Un outil semblable permettrait pourtant à la gestion de trouver le meilleur moyen de combler les besoins en services professionnels, à court terme et de façon plus permanente. Par ailleurs, la dotation et la passation de marchés relevant chacune de centres de décision distincts, les gestionnaires pourraient ne pas recevoir toute l'aide dont ils ont besoin pour déterminer la meilleure approche à adopter (dotation ou recours à la contractualisation) de manière globale. Comme l'ont expliqué les gestionnaires durant les entrevues, le recours à la contractualisation des services professionnels est souvent vu comme un moyen plus facile et rapide que la dotation d'obtenir des ressources et qui offre plus de souplesse lorsque la pérennité du financement n'est pas assurée.

Les entrevues et l'analyse des données montrent que durant l'exercice 2014-2015 l'organisation a dépensé 30,7 M$ pour des ressources contractuelles destinées à l'aider à réaliser des objectifs en matière de TI. De ce chiffre, quelque 20 M$ concernaient des projets d'immobilisations. Les gestionnaires de projets de Gestion de l'information et technologie de l'information (GI-TI) interrogés ont déclaré que pour les programmes qui font l'objet d'un recouvrement des coûts auprès des clients, le Programme de GI-TI ne possède pas de source de financement pérenne (surtout pour les dernières phases d'entretien et de soutien des applications). Or, cela nuit à la prise de décision puisque faute d'être certains de disposer de fonds pour amorcer le processus de dotation, les gestionnaires ne peuvent envisager de solution de rechange à la contractualisation des services professionnels. Les gestionnaires mentionnent également que de nombreux projets livrés par le Programme de GI-TI constituent des tâches distinctes qui ne s'inscrivent pas dans le cours normal des activités. Dans ces cas, le recours à des entrepreneurs est nécessaire puisqu'on a besoin d'une expertise pointue, que des postes permanents ne peuvent être affectés à des projets et en raison de l'incertitude du financement à long terme.

Toutefois, dans le cadre de son Initiative de transformation, le Programme de GI-TI a pris des mesures afin d'analyser les coûts-avantages que représente le recours à des consultants par rapport au recrutement d'employés. L'analyse ne se limite pas aux coûts financiers, mais englobe également le risque opérationnel associé à un trop grand recours à des consultants. On a ainsi cerné 20 postes occupés par des consultants au sein du Bureau de l'élaboration des projets et de la Gestion du portefeuille de projets qui pourraient être dotés de façon permanente s'il y avait une hausse du financement des services votés (financement permanent).

Consultants engagés à long terme

À la longue, un trop grand recours aux consultants peut poser un risque important pour la GRC, tant sur le plan financier qu'opérationnel. En effet, le recours aux mêmes consultants pendant de longues périodes peut conduire à une relation employé-employeur; à la perte de savoir collectif au niveau du service ou de l'organisation; et à une baisse du moral des employés qui possèdent des habiletés similaires à celles des consultants.

L'analyse des données concernant les consultants engagés de manière récurrente montre que ces derniers sont utilisés sur de longues périodes principalement dans trois secteurs, à savoir : les TI, la gestion générale et les biens immobiliers. Puisque les systèmes organisationnels contenaient peu d'information sur les consultants, nous n'avons pas été en mesure de sélectionner un échantillon suffisamment important pour couvrir l'ensemble de ces secteurs. Cependant, avec l'information disponible, nous avons analysé les modalités contractuelles d'un échantillon de 22 consultants, engagés pour une période de 2 à 27 ans. Dans tous ces cas, des contrats avaient été attribués, de façon consécutive, à différents fournisseurs pour obtenir les services du même consultant. La majorité des contrats avaient été attribués au terme d'un processus concurrentiel (à l'exception de contrats de transition, qui sont attribués à des fournisseurs uniques entre deux processus concurrentiels afin d'éviter une interruption de service). Selon l'information disponible dans le système TEAM, 14 des 22 consultants ont été engagés pour travailler à différents projets au cours de leurs contrats avec la GRC. Treize d'entre eux étaient engagés à temps plein et ont facturé au moins 220 journées de travail par an pendant plusieurs années consécutives.

La GRC doit prendre des mesures pour éviter de se retrouver dans une relation employé-employeur, que le consultant soit engagé dans le cadre d'un contrat ou de plusieurs contrats consécutifs conclus avec le même fournisseur ou un fournisseur différent. Les éléments qui peuvent indiquer l'existence d'une relation employé-employeur sont notamment un horaire de travail établi, une relation de supervision et la fourniture d'un espace de travailNote de bas de page 7.

Nous avons examiné les énoncés de travaux, les feuilles de temps, la relation avec les responsables du projet et les conditions de travail de 12 consultants afin de déterminer si une relation employé-employeur pourrait avoir été créée. Dans tous ces cas, nous avons noté des éléments pouvant conclure à l'existence d'une relation employé-employeur telle que décrite plus haut. Or, une relation de ce type peut induire des obligations en termes de pension, de prestations de soins de santé, de contributions de l'employeur, etc. La GRC a pris des mesures pour réduire le risque de voir ce type de relation se créer lorsqu'un contrat de services professionnels est attribué (établissement d'un énoncé de travaux et de livrables clairs, processus concurrentiel, attribution des contrats aux firmes plutôt qu'aux consultants, transmission des rapports et des feuilles de temps par le consultant à sa firme, p. ex.), mais ne surveille pas si un même consultant est engagé par plusieurs services dans le cadre d'une série de contrats consécutifs. Les responsables de la Sous-direction des Acquisitions et des Marchés considèrent qu'il est difficile de surveiller la situation dans la mesure où les contrats de services professionnels sont attribués à des firmes de conseils dans le cadre de processus concurrentiels et font valoir que c'est la firme, et non la GRC, qui propose le(s) consultant(s) à engager dans le cadre du contrat.

Par ailleurs, la rétention à long terme des mêmes consultants, surtout dans le domaine de l' entretien et de l'exploitation des programmes, influe sur le savoir collectif de l'organisation. Faute de transférer leurs connaissances et habiletés aux employés, les consultants engagés pour une longue période créent une dépendance et nuisent à la planification de la relève. Or, compter sur un petit groupe de consultants pour exécuter des tâches qui sont essentielles au fonctionnement de l'organisation pose un risque important pour la continuité des activités.

Notre analyse des 22 consultants engagés à long terme montre aussi que, dans ces situations, le recrutement de personnel aurait permis de réaliser des économies. En analysant la durée pour laquelle le consultant a été engagé, son taux de rémunération moyen, et le nombre de journées de travail facturées par année et en comparant ces données avec le coût d'un employé à temps plein au même niveau, nous avons calculé les économies qui auraient pu être réalisées si on avait procédé par dotation. Sur les 22 cas analysés, l'écart n'était que marginal pour trois d'entre eux. Pour les 19 autres, le consultant coûtait 20 % à 100 % plus cher qu'un employé. Ainsi, on aurait pu économiser environ 1,4 M$ par année au total en recourant à la dotation plutôt qu'à des consultants dans les 22 cas analysés. Ce chiffre est basé sur le salaire et les avantages consentis aux employés comparativement aux coûts directs des consultants, mais ne tient pas compte de tous les coûts indirects (formation et absentéisme, p. ex.).

L'équipe de vérification a eu du mal à cerner les ressources contractuelles engagées à long terme en raison du manque de données. On a demandé à diverses sources de nous fournir des données, mais celles que nous avons reçues n'étaient pas toujours complètes. Ainsi, certains champs du SIGRH, comme le nom du consultant, les dates de début et de fin de mandat ne sont pas mises à jour lorsque le contrat du consultant prend fin ou est prolongé. Par ailleurs, certains contrats ou AT inscrits dans le système TEAM affichent, dans le champ Description, le nom du consultant. Cependant, comme ce champ n'est pas obligatoire, il n'est pas utilisé de manière systématique. L'absence de répertoire de consultants renfermant une information complète fait qu'il est impossible de déterminer avec exactitude le nombre total de consultants qui travaillent actuellement à la GRC ou la durée pour laquelle ils ont été engagés. Cette information est pourtant nécessaire pour évaluer les coûts-avantages globaux de la contractualisation, éviter qu'une relation employé-employeur ne se crée et, afin d'assurer la relève et la continuité des activités, diversifier son effectif plutôt que de recourir principalement à des entrepreneurs.

Utilisation des autorisations de tâches (AT)

Les contrats auxquels sont associées des AT sont habituellement utilisés lorsqu'on ne connaît pas la nature et le calendrier exacts des services requis. Une fois la portée et l'échéancier du travail connus avec précision, le service établit une AT conforme aux modalités du contrat. Les AT ne sont pas des contrats, mais un instrument administratif pour autoriser un travail et l'amorcer par la suite.

La plupart des consultants à long terme faisant partie de notre échantillon avaient été mandatés par le biais d'AT. On les a gardés soit en modifiant ou prolongeant la même AT à plusieurs reprises durant l'année ou les années du contrat, soit en délivrant plusieurs AT dans le cadre du même contrat ou dans le cadre de contrats subséquents passés auprès de fournisseurs différents. Il faudrait peut-être effectuer un contrôle supplémentaire au niveau organisationnel pour s'assurer que le procédé est financièrement avantageux pour la Couronne et que le risque qu'une relation employé-employeur se crée au fil du temps est adéquatement atténué.

Dans 14 des 72 dossiers de contrat que nous avons examinés, des AT avaient été modifiées ou prolongées à plusieurs reprises (deux fois ou plus). Au lieu d'indiquer les changements aux besoins organisationnels, on se contentait souvent d'indiquer à titre de justification qu'on avait ajouté des fonds ou des journées. Par ailleurs, certaines autorisations de tâches avaient été modifiées ou prolongées jusqu'à huit fois, sans autre justification que celles décrites plus haut.

Le Programme de GI-TI a expliqué que certaines de ces modifications servent à atténuer des risques (tâches autorisées pour des périodes plus courtes afin d'atténuer des retards ou des interruptions de projet; tâches autorisées pour un exercice et prolongées annuellement dans les limites du contrat pour correspondre au cycle budgétaire annuel; ou tâches autorisées à court terme, puis prolongées tout au long de l'année lorsque l'organisation ne prévoit pas garder le consultant longtemps et cherche à doter le poste correspondant). Cependant, nous avons noté que certaines AT concernant les entrepreneurs à long terme de notre échantillon avaient fait l'objet de multiples modifications durant la même année. Or, cela alourdit le fardeau administratif de l'organisation et peut traduire des faiblesses dans les processus de planification et de supervision si les motifs ne sont pas adéquatement documentés.

Afin d'optimiser les ressources et d'atténuer les risques encourus lorsqu'on engage des ressources contractuelles à long terme, les gestionnaires de la GRC devraient rigoureusement documenter les modifications apportées aux AT, ainsi que toute décision de prolonger un contrat ou de faire appel de nouveau aux mêmes consultants après une certaine période.

3.2 Conformité aux politiques et aux procédures

Bien que globalement la loi, les politiques et les procédures applicables soient bien respectées, une gestion des dossiers et des pratiques de conservation améliorées permettraient de s'assurer que les décisions importantes sont bien documentées et justifiées. Par ailleurs, dans certaines situations, il serait préférable, sur les plans de l'équité, de l'ouverture et de la transparence, de recourir au processus concurrentiel plutôt que d'attribuer le contrat à un fournisseur unique.

La vérification visait à examiner si les pratiques de contractualisation des services professionnels de la GRC étaient conformes à la Politique sur les marchés du CT, au Règlement sur les marchés de l'État et aux politiques, directives et procédures de la GRC sur la passation des marchés. Nous nous attendions à ce que :

  • les dossiers d'acquisition facilitent la supervision de la gestion et fournissent une piste de vérification complète contenant les détails de la passation en ce qui a trait aux communications et décisions pertinentes, notamment l'identité des personnes et autorités responsables de l'approbationNote de bas de page 8
  • la GRC se conforme aux exigences en matière de divulgation proactive des contratsNote de bas de page 9
  • comme l'exige la GRC, un document de demande a été créé dans le système TEAM pour toutes les acquisitions de services supérieures à 10 000 $ et les paiements connexes font référence à un document d'achat dans le système TEAMNote de bas de page 10
  • les firmes et consultants ont eu la possibilité de concourir et que le recours répété à une même personne ou firme sans appel à la concurrence est l'exceptionNote de bas de page 11
  • le pouvoir de conclure un marché (pouvoirs d'exécuter une opération) est séparé du pouvoir d'attestation prévu à l'article 34 de la LGFP et ces tâches ne sont pas accomplies par la même personneNote de bas de page 12

Administration des dossiers de contrat

Un échantillon discrétionnaire de 72 contrats de services professionnels a été examiné. Il comprenait des contrats passés avec ou sans processus concurrentiel, des commandes subséquentes à une convention d'offres à commandes (COC) et des contrats nécessitant des AT afin de préciser et d'autoriser les différents éléments des travaux. La documentation figurant dans les dossiers de contrat a été évaluée en regard de 27 exigences fixées par les politiques du Conseil du Trésor et les directives de la GRC, afin de mesurer le niveau de conformité. Il s'agissait plus précisément de s'assurer que le dossier contenait :

  • les demandes de services, y compris les formulaires et approbations nécessaires, ainsi que la raison pour laquelle on a décidé de recourir à la contractualisation;
  • les documents de planification, notamment l'établissement des besoins, les autorisations et les formulaires exigés dûment remplis;
  • les preuves de la demande de soumissions et le processus et les critères d'évaluation;
  • la documentation concernant l'attribution du contrat et la base de paiement;
  • la justification et l'approbation de toute modification du contrat;
  • Et que le contrat avait été administré et clos de façon adéquate et avait fait l'objet d'une divulgation proactive.

La vaste majorité (88,5 %) des contrats examinés étaient conformes aux politiques du CT et aux exigences de la GRC. On peut donc dire que la GRC a un processus de demandes de soumissions, d'évaluation et de passation des marchés rigoureux. Cependant, des incohérences et des faiblesses ont été relevées dans la tenue des dossiers, principalement en raison de documents manquants ou insuffisants. Le taux de non-conformité concernait, dans une proportion de 53 %, des dossiers de contrats comprenant des AT et des commandes subséquentes à des COC auprès du Corps des commissionnaires.

L'équipe de vérification a remarqué que certains dossiers d'AT tenus par les responsables de projet du Programme de GI-TI contenaient des feuilles de temps comme justificatifs des factures payées. Bien qu'il ne soit pas obligatoire de conserver les factures ou les feuilles de temps, c'est là une bonne pratique qui facilite l'examen du dossier.

Divulgation proactive des marchés et modifications

Les Lignes directrices sur la divulgation proactive des marchés du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada précisent les exigences de divulgation publique concernant les marchés de plus de 10 000 $. Ces règles reflètent, plus largement, l'engagement du gouvernement en faveur de la transparence et d'une meilleure responsabilisation au sein du secteur public.

À ce chapitre, nous avons constaté que si la majorité des 72 contrats de notre échantillon avaient fait l'objet d'une divulgation proactive adéquate, deux contrats ainsi que les modifications apportées à cinq autres n'avaient pas été divulgués. Les montants non divulgués totalisaient 645 604 $.

Ces omissions découlent d'erreurs de codage dans le système TEAM (modifications consignées et sauvegardées comme « corrections » et inscription de la date d'attribution du contrat erronée). Elles ont été partiellement rectifiées et ont fait l'objet d'une divulgation postérieure à la vérification.

Paiement de services professionnels sans contrat établi

En plus de l'examen des dossiers de contrat, nous avons analysé les paiements effectués durant l'exercice 2015 pour des services professionnels sans référence à une commande d'achat dans le système TEAM. L'analyse portait sur les montants supérieurs à 10 000 $, ainsi que les paiements fréquents faits aux mêmes fournisseurs quels qu'en soient les montants.

Des 49 paiements examinés, 24 concernaient des ententes de services conclues avec des provinces, des municipalités, des corps policiers et des universités. Aucun suivi détaillé n'a été fait concernant ces opérations puisqu'elles étaient exclues de la vérification. Les 25 opérations restantes ont été examinées à la lumière des documents à l'appui : factures, formulaires d'approbation ou contrats. Voici nos observations :

  • Durant l'examen, la Sous-direction des Acquisitions et des Marchés nous a fait remarquer que, suivant le principe d'équité relatif à la passation des marchés, les besoins à l'origine d'une des opérations auraient dû être comblés par processus concurrentiel plutôt que par une entente de services. Après examen de la documentation, nous partageons cette conclusion;
  • Bien que des COC existaient, 10 opérations concernant trois fournisseurs ont été réglées sans passer par le processus de commandes subséquentes approprié. Une COC n'est pas un contrat, mais plutôt un processus par lequel un contrat séparé est conclu chaque fois qu'on procède à une commande subséquente de biens ou de services dans le cadre de la COC; les dépenses totales n'étaient pas toujours étroitement surveillées, de sorte que la limite financière fixée pour deux de ces COC a été dépassée;
  • Six autres paiements, non reliés à des COC, et supérieurs à 10 000 $ ont été faits à un fournisseur sans référence à un bon de commande, contournant ainsi les exigences financières;
  • Deux des opérations examinées pourraient constituer un fractionnement de contrat pour des services fournis le même jour ou en plusieurs phases dans le cadre d'un projet (avec un montant total supérieur à 10 000 $), contournant ainsi les exigences financières. Nous avons signalé ces deux cas aux Services des acquisitions afin qu'ils fassent un suivi et prennent les mesures qui conviennent;
  • Contrairement aux procédures financières établies relativement aux comptes créditeurs, nous avons également trouvé dans notre échantillon quatre dossiers dépourvus de la documentation nécessaire aux fins de vérification des comptes concernant les opérations risquées (liste de contrôle préalable à la vérification et certification pour les opérations supérieures à 100 000 $ suivant l'article 33 de la LGFP) et deux autres concernant des erreurs de codage (l'une concernait des subventions codées comme services professionnels et l'autre, une erreur de codage dans la catégorie des services professionnels).

L'analyse des données effectuée sur la totalité des paiements pour services professionnels faits sans référence à un bon de commande dans le système TEAM montre que :

  • à plusieurs reprises, la GRC a obtenu, de façon répétée, des services professionnels auprès du même fournisseur sans appel à la concurrence. Or, lorsque le besoin d'un service peut être raisonnablement planifié, on doit s'assurer que le processus est juste, ouvert et transparent et que le contrat est attribué sur la base du meilleur rapport qualité-prix;
  • dans deux cas, des paiements pour services professionnels ont été faits à des fournisseurs qui avaient un contrat avec la GRC sans toutefois que celui-ci soit référencé. Or, cela nuit à la transparence et peut entraîner des paiements en double ou un dépassement de la valeur du contrat.

3.3 Contrôle et supervision

Le programme d'assurance de la qualité des contrats (ACQ) et le comité de révision des marchés sont un moyen efficace de contrôler et de superviser les activités de contractualisation des services professionnels. Cependant, ils pourraient l'être davantage si leur portée était élargie aux contrats pour lesquels on a recours à des AT et aux commandes subséquentes passées par SPAC dans le cadre de COC. Par ailleurs, si l'information sur les contrats et les entrepreneurs consignée dans les bases de données de la GRC était plus complète, on pourrait exercer un contrôle et une surveillance plus exhaustifs et ainsi, potentiellement, réaliser des économies.

En examinant la contractualisation des services professionnels, nous nous attendions à ce que :

  • la GRC ait établi et mis en œuvre un cadre de contrôle garantissant une diligence raisonnable et une gestion efficace des fonds publics;
  • les systèmes d'information de l'organisation contiennent des données fiables, complètes et pertinentes permettant un contrôle efficace de la contractualisation des services professionnels;
  • les différents services et divisions de la GRC au pays suivent une approche cohérente en matière de gestion des marchés (p. ex. le contrat passé avec le Corps des commissionnaires), qui garantit la conformité aux politiques du CT et aux procédures de la GRC.

Assurance de la qualité des contrats

En 2005, la GRC a établi un programme d'assurance de la qualité des contrats (AQC) afin que les activités d'acquisition et de passation des marchés soient efficaces et conformes aux politiques et lois applicables. Le processus d'AQC comprend des contrôles préventifs (avant la signature du contrat) et un examen post-contractuel (après la signature du contrat). L'AQC porte sur les contrats autorisés par le personnel de la GRC, mais exclut ceux pour lesquels SPAC est l'autorité contractante. Le comité de révision des marchés (CRM) a été établi en 2007 comme organe de contrôle préventif visant à examiner les acquisitions de grande valeur ou posant un risque élevé avant l'attribution ou la signature d'un marché.

Bien que l'établissement de l'examen post-contractuel a amélioré les activités de contractualisation de la GRC, il pourrait être avantageux d'en élargir la portée de façon à inclure l'ensemble des instruments d'acquisition utilisés par les gestionnaires de la GRC. Concernant les marchés passés par SPAC, le processus d'AQC devrait se limiter aux aspects du processus d'acquisition qui relèvent de la GRC.

Suivant les Lignes directrices et pratiques exemplaires en matière d'assurance de la qualité des contrats, les facteurs pris en compte au moment de procéder à un échantillonnage en vue de l'examen post-contractuel sont : le nombre d'opérations effectuées dans un bureau particulier; la valeur des opérations dans chaque catégorie; les antécédents de la section dont les opérations sont examinées. Or, ce processus de sélection pourrait être amélioré en incluant d'autres facteurs de risques, tels que : le type et la durée du contrat, le processus de demande de soumissions, le nombre de modifications, les fournisseurs récurrents, le fractionnement potentiel du contrat, etc. En améliorant ainsi la stratégie actuelle d'échantillonnage fondée sur le risque, les procédures de contrôle seraient davantage axées sur les éléments qui présentent un risque élevé.

Information disponible aux fins de contrôle et de supervision

Nous avons utilisé des données extraites du système TEAM et du SIGRH pour tenter d'obtenir le portrait des activités de contractualisation des services professionnels à la GRC. Cependant, aucun des deux systèmes ne renferme d'information suffisamment complète pour permettre d'évaluer de façon exhaustive les besoins et les lacunes de l'organisation sur le plan des habiletés et des compétences et de déterminer si le recours à des entrepreneurs est le moyen le plus rentable et viable d'exécuter certaines activités. Les noms des consultants ne sont pas toujours inscrits dans la base de données sur les contrats du système TEAM et il n'existe pas de liste complète et exacte des ressources contractuelles utilisées. Par ailleurs, la base de données du SIGRH sur les consultants n'est pas à jour (certains consultants qui ne travaillent plus à la GRC y figurent toujours), de sorte qu'il est difficile d'effectuer une quelconque analyse des tendances ou des coûts-avantages concernant les ressources contractuelles.

Nous avons également noté des incohérences dans la manière dont sont consignés et suivis les contrats auxquels sont associés des AT. Dans certains cas, les dépenses liées à des AT sont inscrites dans le système TEAM; dans d'autres (sept cas observés), le suivi est effectué par rapport au contrat et les AT sont inscrites dans le champ des commentaires. Dans ces sept cas, les gestionnaires consignaient manuellement les dépenses afin de s'assurer qu'elles ne dépassaient pas la valeur totale du contrat. Or, lorsqu'on n'utilise pas le système pour consigner les AT, cela alourdit le fardeau administratif et on risque de dépasser les limites financières du contrat.

Des données exactes et complètes permettraient d'examiner et d'analyser régulièrement les dépenses liées aux services professionnels de manière à cerner les tendances concernant le type de services acquis, ainsi que les coûts de ces services par rapport à d'autres options comme le recrutement d'employés. Et ce type d'analyse pourrait également aider à trouver des moyens de réaliser des économies. Par exemple, si les services engagent souvent des gestionnaires de projet contractuels, l'organisation pourrait avoir avantage à développer une expertise interne dans ce domaine.

Pour conclure, la GRC aurait avantage à mieux consigner les données sur la contractualisation afin d'appuyer une stratégie de supervision et de contrôle fondée sur les risques.

Gestion des contrats de services professionnels utilisés par plusieurs services ou divisions

Durant l'exercice 2014-2015, l'ensemble des divisions et la DG de la GRC ont dépensé au total 49,6 M$ dans le cadre de contrats passés avec le Corps des commissionnaires. Malgré l'importance de cette dépense, la planification et le contrôle des services fournis par les commissionnaires varient d'une division à l'autre, car il n'existe pas d'approche commune. Or, cette façon de faire pose plusieurs problèmes :

  • Concernant le traitement des débours, certains paiements ont été faits sans référence à un bon de commande (BC), ce qui nuit au rapprochement des comptes. Sur le total des paiements effectués au Corps des commissionnaires durant l'exercice 2014-2015, 31,3 M$ l'ont été sans référence à un BC, principalement dans les divisions D, E, F, G et T. Le système TEAM est configuré de manière à exiger une triple correspondance (BC, biens reçus et facture) pour toutes les opérations d'acquisition de biens et de services, lorsque la facture porte un BC;
  • L'absence de certaines approbations concernant le lancement du processus d'acquisition et la formule 4041 pour amorcer la demande de services;
  • Dans certains dossiers, rien ne prouve qu'on a établi les besoins pour les services des commissionnaires (comme le formulaire 7170-1 de TPSGC - Annexe à la demande de services de commissionnaires -, qui fournit des détails sur les services requis (niveau de service, nombre de gardes, différents grades et calendrier de service), ou tout autre formulaire).

4. Recommendations

  1. Le DPFA devrait communiquer aux différents clients à la GRC les exigences de documentation relativement aux contrats, notamment celles figurant dans la liste de contrôle de l'AQC, ainsi que les documents prouvant que le client a effectué une analyse des solutions de rechange à la contractualisation de même qu'une analyse des coûts-avantages et des risques avant d'amorcer le processus d'acquisition et de délivrer une AT.
  2. Le DPFA devrait examiner le bien-fondé et la faisabilité de mettre en place une approche uniforme relativement à la collecte, à la mise à jour et à la gestion de l'information concernant les consultants en services professionnels dans des bases de données afin de mieux contrôler les risques associés au recours à des consultants sur de longues périodes.
  3. Le DPFA devrait accroître les contrôles en :
    1. élargissant la portée du programme des post-vérifications de l'AQC à tous les types de contrats de services professionnels qu'utilisent les gestionnaires à la GRC;
    2. révisant et améliorant l'approche fondée sur le risque de sélection des contrats aux fins d'examen;
    3. s'assurant qu'il existe un contrôle fondé sur les risques des paiements effectués sans référence à un bon de commande dans le système TEAM.
  4. Le DPFA devrait évaluer la nécessité d'effectuer un suivi des cas de non-conformité aux politiques de passation des marchés et des paiements effectués sans référence à un bon de commande dans le système TEAM mis au jour dans le cadre de notre vérification.

5. Conclusion

Le recours à la contractualisation des services professionnels vise à compléter les ressources internes afin de répondre aux différents besoins opérationnels. Étant donné la valeur, la complexité et la nature délicate des contrats en jeu, la GRC doit exercer une gestion rigoureuse, prudente et diligente. La mise sur pied du programme d'AQC en 2005 a permis d'exercer une supervision continue de façon à s'assurer que les activités liées aux acquisitions sont conformes aux lois, politiques et procédures applicables. À peu près à la même période a également été créé le comité de révision des marchés, qui est le garant d'une gestion prudente, honnête et saine des contrats. La création de ces organes de supervision a amélioré la conformité aux lois, politiques et règlements puisque pour les 72 dossiers vérifiés, le taux de conformité aux exigences contractuelles était de 88,5 %.

Toutefois, la planification, le contrôle et la supervision de la passation des marchés de services professionnels peuvent encore être améliorés. Pour gérer les fonds publics de la façon la plus efficace et économique possible, la GRC doit bien connaître l'étendue et la nature de ses ressources contractuelles et procéder régulièrement à une évaluation documentée des solutions de rechange à la contractualisation. L'efficacité économique ne peut être démontrée qu'en examinant attentivement les risques, les avantages et les coûts de la contractualisation par rapport aux autres moyens de satisfaire les besoins. Par ailleurs, bien que les gestionnaires sachent que le recours aux consultants pendant de longues périodes peut être assimilé à une relation employé-employeur, on devrait examiner plus attentivement ces situations, actuelles et futures, de manière à en atténuer les risques.

De même, un contrôle et une supervision accrus permettraient de s'assurer que les contrats de services professionnels sont gérés comme il se doit. En particulier, le programme d'AQC pourrait englober l'ensemble des instruments d'acquisition utilisés par les gestionnaires à la GRC et exercer une fonction d'examen critique afin de contrôler efficacement le processus d'acquisition. Par ailleurs, afin d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix et garantir un processus de contractualisation équitable, ouvert et transparent, on pourrait instituer un contrôle fondé sur le risque des paiements effectués sans référence à un bon de commande dans le système TEAM.

Enfin, en définissant clairement les exigences de gestion de l'information concernant les contrats de services professionnels et en mettant en œuvre une approche cohérente en matière de collecte et de mise à jour de l'information et de tenue de la base de données connexes, la GRC pourrait mieux déterminer les risques, analyser les tendances et les solutions de rechange et cerner les moyens de réaliser des économies.

Annexe A – Objectif et critères de vérification

Objectif : La vérification visait à évaluer si la contractualisation des services professionnels par la GRC est rentable et conforme à la Politique sur les marchés du CT, au Règlement sur les marchés de l'État et aux politiques, directives et procédures de passation des marchés de la GRC.

Critère 1 : Les contrats de services professionnels sont utilisés pour obtenir une expertise spécialisée dont la fonction publique ne dispose pas, pour répondre aux fluctuations imprévues dans la charge de travail ou pour pallier l'absence temporaire de fonctionnaires.

Critère 2 :La décision d'engager des fournisseurs de services professionnels est fondée sur une analyse adéquate et l'évaluation des avantages, des coûts et des risques.

Critère 3 :Les pratiques de contractualisation sont conformes à la Politique sur les marchés du CT, au Règlement sur les marchés de l'État et aux politiques, directives et procédures de la GRC sur la passation des marchés énoncées dans la Liste de contrôle de l'assurance de la qualité des contrats (AQC).

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