Vol. 76, Nº 1Reportages

Tirer ou ne pas tirer?

Une formation par simulateur pour apprendre à réagir

Le cap. Dave Falls utilise le simulateur à la DG pour maintenir ses compétences. Crédit : Mallory Procunier

L'automne dernier, l'équipe éditoriale de la Gazette a été invitée à essayer un simulateur de recours à la force à la Direction générale de la GRC, à Ottawa. Elle a été à même de constater les défis auxquels sont confrontés les policiers à l'arrivée sur les lieux d'un incident en cours et les nombreuses compétences décisionnelles qui entrent alors en jeu. Mallory Procunier raconte son expérience et explique en quoi même les policiers chevronnés peuvent tirer parti de cet outil.

L'automne dernier, l'équipe éditoriale de la Gazette a été invitée à essayer un simulateur de recours à la force à la Direction générale de la GRC, à Ottawa. Elle a été à même de constater les défis auxquels sont confrontés les policiers à l'arrivée sur les lieux d'un incident en cours et les nombreuses compétences décisionnelles qui entrent alors en jeu. Mallory Procunier raconte son expérience et explique en quoi même les policiers chevronnés peuvent tirer parti de cet outil.

J'ai les mains moites dès que je referme mes doigts autour de la crosse du pistolet. C'est beaucoup plus lourd que je pensais.

Soudainement, je suis dans le corridor d'une école et j'entends des cris, puis deux coups de feu. J'avance et je passe à côté d'un jeune homme couché sur le ventre dans une mare de sang. Ne voyant pas d'arme, je crie à mon collègue policier imaginaire que la victime n'est pas armée. Je me dis que nous avançons trop vite. Je ne sais pas quoi faire ensuite.

J'entends crier « Ne tirez pas, ne tirez pas » dans une salle au bout du couloir. J'y cours et je me retrouve nez à nez avec une adolescente qui tient un élève en otage. Elle pointe son arme à feu dans mon visage.

Je lui crie de lâcher son arme, probablement trop doucement. Et comme si je n'avais rien dit, elle tire sur son otage et sur moi. Il n'y a plus rien à l'écran.

Au fond de la salle du sous-sol de la Direction générale (DG) de la GRC à Ottawa, assis à un ordinateur, d'où il a contrôlé tout ce qui vient d'arriver dans la simulation, le serg. Mirza Karimullah me dit de baisser mon arme et je me tourne pour le regarder.

Un analyste supérieur des politiques de la section du recours à la force de la DG m'explique calmement que j'ai hésité, mais pour moi, tout s'est passé à la vitesse de l'éclair.

Cette fois, quand la simulation commence, le cap. Dave Falls, ancien membre du Programme canadien de protection des transporteurs aériens, est debout à l'avant de la salle entre deux piliers de bois représentant un champ de tir.

Il refait le même scénario; il crie des codes à ses collègues imaginaires et agit comme s'il avait fait cela des centaines de fois. Dès qu'il rejoint la menace active, il tire - un tir parfaitement placé pour la neutraliser et secourir les otages.

Ce simulateur enseigne aux membres le recours à la force approprié en les plaçant dans une situation où ils doivent prendre des décisions cruciales très rapidement. Il aide aussi à maintenir des compétences qui se perdent, comme la mémoire musculaire, l'acquisition de la cible et l'enchaînement des actions et des décisions d'un membre.

« Comme la formation par scénario obligatoire de la GRC, cette formation est beaucoup plus dynamique, il ne suffit pas de tirer des coups de feu sur une feuille de papier immobile, affirme Falls. L'épreuve annuelle de qualification au tir ne nécessite pas de prendre des décisions rapides et d'intervenir en ayant recours à la force. Tout ce que je peux faire pour rester alerte et dans la partie est important pour moi. »

Karimullah passe en revue d'autres scénarios avec moi - un tireur fou dans les tunnels sous la colline du Parlement, un immeuble de bureaux où des criminels armés sont cachés dans tous les coins et une femme jalouse s'en prend à son mari infidèle dans la cafétéria du Sénat.

Parfois, je dois utiliser mon arme à feu, et dans certains cas je peux désenvenimer la situation en parlant au suspect et en le persuadant de déposer son arme.

Karimullah sourit, car il peut voir, qu'en seulement trois heures, ma façon de penser a changé - je comprends maintenant combien il est difficile pour les membres de prendre des décisions sous pression.

« Il n'existe pas de formation permettant de savoir quand une personne va tirer, dit-il. Il faut tenir compte de l'ensemble de la situation. »

Pour Falls, qui est très efficace avec une arme à feu, la formation par simulateur n'est qu'un autre aspect du travail.

« Le simulateur est un outil formidable pour montrer combien il est difficile de prendre une décision en une fraction de seconde lorsqu'il s'agit de vie ou de mort - surtout dans le cas des policiers qui n'ont pas été exposés à ce type de situation. »

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