Vol. 77, Nº 2Les outils du métier

Privilégier l’information aux aveux

Pour des interrogatoires efficaces

Le cap. Kevin Jeffery dirige une simulation d'entrevue dans le cadre de la formation d'agents de la GRC au Modèle progressif d'interrogation des suspects au Centre de formation de la Région du Pacifique. Crédit : Leann Parker, Groupe des technologies d'apprentissage du CFRP

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Dans une entrevue d'enquête avec un suspect, il revient au policier de donner le ton.

Les techniques d'interrogation sont multiples et allient diverses combinaisons d'éléments accusatoires et non accusatoires. Et jusqu'à tout récemment, la GRC privilégiait les premiers.

Le hic, explique le serg. Darren Carr, c'est que ce mode ne laisse pas beaucoup de marge de manœuvre à l'intervieweur. Le serg. Carr, rattaché à l'équipe d'entrevue de la GRC en Colombie-Britannique, est également président du groupe de travail à l'origine de la nouvelle norme d'entrevue de la GRC, le Modèle progressif d'interrogation des suspects.

« Nous voulions simplement aider nos effectifs en leur inculquant les compétences voulues pour réaliser une entrevue efficace », explique le serg. Carr.

Un modèle à suivre

Le groupe de travail, formé d'experts en la matière de la GRC, a élaboré un modèle inspiré de leur expérience sur le terrain et conforme à la loi canadienne.

Selon le s.é.-m. Peter Tewfik, ancien président du groupe de travail, le nouveau modèle ramène l'entrevue à un objectif simple : la collecte d'information.

Le modèle comprend six phases : examen, préparation et planification; introduction et obligations; dialogue, remise en question de la version initiale; accusation et persuasion; post-interrogatoire. L'exécution des six phases intégrales est facultative, cependant.

« On cherche d'abord et avant tout à amorcer le dialogue, souligne le s.é.-m. Tewfik. L'une des principales lacunes de notre ancien modèle est qu'il se fondait sur une présomption de culpabilité. Nous avons éliminé ce principe; il s'agit désormais de recueillir l'information qui fera progresser l'enquête, quelle qu'elle soit. »

Axé sur la recherche de la vérité, le modèle offre aux membres une plus grande marge de manœuvre en fonction de la tournure que prend l'entrevue et des éléments de preuve relevés.

Il s'agit ainsi de se détacher de la quête d'un aveu et de garder une certaine ouverture d'esprit.

C'est une excellente voie à suivre pour la prochaine génération de membres afin d'atteindre la vérité, ajoute l'insp. Scott McLeod, off. resp. de la Section des contrôles de sincérité à la Direction générale de la GRC.

Une démarche polyvalente

Le modèle est actuellement mis en œuvre au Centre de formation de la Région du Pacifique (CFRP) en Colombie-Britannique.

Le serg. Bruce Pitt Payne, du CFRP, explique que la formation est structurée de façon à offrir aux membres des possibilités de perfectionnement et des techniques tout au long de leur carrière, plutôt qu'un cours unique en début de service.

Le groupe de travail, formé d'experts en la matière de partout au pays, a résolu un problème de longue date.

« La Gendarmerie n'appliquait pas nécessairement une norme uniforme, précise le serg. Pitt Payne. Grâce au groupe de travail, on a recueilli l'avis de divers membres dans l'élaboration et la mise en œuvre du modèle, ce qui permet d'uniformiser la norme de formation dans chaque province. »

Le serg. Pitt Payne ajoute que la démarche, tout comme le modèle, est évolutive. Le groupe de travail est prêt à apporter des changements qui reflètent l'évolution des techniques de collecte d'information.

Le CFRP offrira un cours de cinq jours sur la nouvelle technique, assorti d'un module en ligne. Les membres qui ont déjà suivi le cours disent être moins sensibles à la pression au moment d'aborder une entrevue d'enquête.

« Ils sont désormais affranchis du cadre rigide autrefois imposé, explique le serg. Pitt Payne. Cela les encourage à aborder de front l'entrevue et à mettre les techniques en pratique, sans craindre d'échouer dans l'obtention d'aveux. »

Parmi les outils fondamentaux du policier, les techniques d'entrevue sont l'un des plus importants et sont utilisées au quotidien. Pour le s.é.-m. Carr, inculquer aux membres les techniques dont ils ont besoin pour réaliser de meilleures entrevues et recueillir plus d'informations ne peut que faire avancer les enquêtes.

« Il nous faut chercher à obtenir davantage que des aveux, explique le s.é.-m. Carr. Il s'agit d'obtenir des éléments de preuve et de donner au sujet la possibilité de dire ce qu'il a à dire. »

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