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Entrevue avec un expert en surveillance électronique sur les défis liés à la collecte de preuves

Le serg. Dave Cobey se spécialise dans l'utilisation d'outils de surveillance électronique. Crédit : GRC

De nos jours, les Canadiens utilisent des appareils électroniques pour communiquer dans presque toutes les situations. Les criminels ne sont pas différents et leurs communications électroniques peuvent être utilisées comme preuves dans les enquêtes. Paul Northcott, rédacteur pour la Gazette, s'est entretenu avec le serg. Dave Cobey de la GRC, qui est spécialiste du processus complexe menant à l'utilisation d'outils de surveillance électronique pour enquêter sur des crimes graves.

Quel est votre rôle à la GRC?

Je suis conseiller auprès du Programme national de gestion des dossiers techniques de la GRC et je travaille avec des enquêteurs et la Couronne pour veiller à ce que la surveillance soit effectuée de manière responsable et en conformité avec la Charte canadienne des droits et libertés. Le personnel de notre programme s'assure également que la technologie utilisée dans les enquêtes est décrite avec précision dans les mandats, tout en protégeant les techniques d'enquête de nature délicate. À l'heure actuelle, je suis affecté au Programme national d'intégration des technologies, créé en 2021 dans le but d'améliorer la façon dont la GRC gère l'utilisation des nouvelles technologies et des outils d'enquête permettant la collecte et l'utilisation de renseignements personnels.

Quand et comment la GRC recueille-t-elle des éléments de preuve numériques?

Les enquêteurs doivent indiquer ce dont ils ont besoin, puis obtenir l'autorisation judiciaire appropriée pour se le procurer. Ils doivent préparer un affidavit détaillé qui explique clairement l'infraction et les raisons pour lesquelles d'autres options d'enquête ne fonctionneraient pas. S'ils reçoivent l'autorisation d'un juge pour aller de l'avant, ils collaboreront avec des spécialistes techniques et d'autres employés pour essayer de recueillir ou d'intercepter l'information.

Toutefois, nous posons souvent la question suivante aux enquêteurs : « Est-ce qu'il serait possible de trouver l'information ailleurs? » Bien des gens utilisent des mots de passe très simples pour leurs appareils et certains d'entre eux écrivent même ces mots de passe. Ces renseignements peuvent aussi être stockés dans d'autres dispositifs ou dans un système virtuel. Il serait alors possible d'utiliser un mandat de perquisition pour obtenir cette information.

Nommez quelques-uns des défis auxquels vous êtes confronté?

Avant l'arrivée des appareils mobiles, il y avait des lignes terrestres ou des téléphones fixés au mur. Ces téléphones étaient habituellement fournis à des personnes ou à des entreprises par une grande société et ils étaient liés à un emplacement géographique. À cette époque, si un policier avait en main une ordonnance judiciaire pour faire de la surveillance dans ces circonstances, il communiquait avec une des grandes sociétés de télécommunication et présentait son ordonnance judiciaire.

De nos jours, il existe divers appareils, produits par différentes entreprises, qui sont liés à des personnes et non à des endroits. Bon nombre des organisations qui fournissent ces services ne sont pas situées au Canada. De plus, ces appareils utilisent des applications et des logiciels différents. Tous ces facteurs compliquent la collecte de données.

Le chiffrement pose aussi un problème. Il s'agit d'une fonctionnalité importante de nos jours parce qu'elle protège les renseignements de nature délicate et la vie privée des gens. Cependant, le chiffrement aide les criminels à mener des activités illégales tout en échappant à la surveillance policière. L'utilisation répandue du chiffrement bout-en-bout représente un défi important pour la police parce que même si elle est en mesure de recueillir les données chiffrées, ces dernières pourraient être illisibles.

Qu'est-ce qu'un OEE et quelle est son utilité pour la police?

Les outils d'enquête embarqués (OEE) peuvent être utilisés dans des appareils chiffrés pour obtenir des renseignements. Un OEE est un programme informatique qui peut être installé dans un appareil à l'insu de son propriétaire. Il permet à la police de recueillir secrètement des preuves électroniques. Des agents spécialement formés utilisent des OEE pour recueillir des données avant qu'elles soient chiffrées ou après qu'elles ont été déchiffrées. Les OEE peuvent être installés physiquement ou à distance et ils peuvent être programmés pour effectuer plusieurs tâches. La GRC les utilise avec parcimonie. On y a seulement recours dans les enquêtes relatives aux crimes graves et à la sécurité nationale et uniquement après avoir obtenu une autorisation judiciaire.

Comment voit-on l'avenir concernant la collecte de preuves numériques?

Les défis associés à la collecte de preuves numériques deviendront de plus en plus compliqués à mesure que la technologie change et que de nouvelles technologies se développent. Cependant, la GRC doit continuer de collaborer et d'établir des partenariats avec des procureurs, des conseillers juridiques et des partenaires des secteurs public et privé qui se spécialisent dans la surveillance.

Peu importe comment les choses se déroulent, pour que la surveillance électronique soit efficace et conforme à la Charte canadienne des droits et libertés, il faut des communications détaillées et régulières entre les enquêteurs. Par exemple, il est toujours important que les policiers consultent leur Section des affaires spéciales I — il s'agit d'équipes provinciales qui donnent des conseils d'expert dans le domaine de la surveillance électronique secrète — et d'autres services avant de décider des mesures à prendre. Par ailleurs, si les policiers envisagent de nouvelles techniques pour recueillir ou utiliser des renseignements personnels, ils doivent consulter le Programme national d'intégration des technologies.

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