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Un agent de la GRC en tenue de bureau est assis à un poste de travail devant plusieurs écrans d'ordinateur.

Entretien avec un spécialiste en identification qui aide à sauver des enfants exploités

Le caporal Stephen Ludlow travaille depuis deux ans et demi dans le domaine de l'identification des victimes et fait partie du groupe spécialisé dans ce domaine, dont la renommée est mondiale, au Centre national contre l'exploitation des enfants (CNEE). Crédit : Gend. Jennifer Thomson

Au Centre national contre l'exploitation des enfants (CNEE) de la GRC, il existe un groupe spécialisé dont le travail consiste à identifier et à protéger les victimes représentées dans du matériel à caractère pédosexuel. L'an dernier, le Groupe de l'identification des victimes a aidé les enquêteurs canadiens à identifier 396 victimes au pays. Travis Poland, de la Gazette, s'est entretenu avec le caporal Stephen Ludlow, un spécialiste du domaine.

Comment décririez-vous votre travail?

L'exploitation sexuelle d'un enfant est un crime grave. Les auteurs de ce type d'exploitation utilisent souvent les images qu'ils recueillent pour leur propre satisfaction, ou encore pour les diffuser ou pour les échanger avec d'autres agresseurs. Mon rôle, comme spécialiste en identification des victimes, est d'analyser des images et des vidéos et d'utiliser des techniques spéciales et des méthodes d'enquête traditionnelles pour trouver et sauver les victimes représentées dans le matériel. À défaut de pouvoir identifier les délinquants, nous cherchons à identifier les victimes pour éviter qu'elles subissent d'autres mauvais traitements.

L'exploitation sexuelle d'enfants n'a pas de frontières; les images peuvent être captées n'importe où dans le monde. Nous collaborons étroitement avec des spécialistes en identification des victimes partout sur la planète pour nous aider à localiser un enfant. Une fois nos recherches délimitées à un pays, nous tentons de trouver la province et la ville, puis nous poursuivons nos recherches jusqu'à ce que l'enfant puisse être secouru. Nous collaborons également avec nos homologues internationaux pour nous assurer qu'aucun indice n'est négligé d'un pays à l'autre.

Qu'est-ce qui vous a motivé à travailler pour ce groupe?

Plus tôt dans ma carrière, j'ai eu l'occasion de sauver une victime qui était en train de se faire agresser sexuellement. Je n'oublierai jamais son regard de soulagement et de gratitude. J'ai joint le groupe pour pouvoir sauver d'autres enfants maltraités.

Vous travaillez avec plus de 50 groupes de lutte contre l'exploitation des enfants dans Internet (GLEEI) partout au Canada. Comment votre équipe soutient-elle d'autres services de police?

Même s'il est relativement petit, le Groupe de l'identification des victimes de la GRC est reconnu comme un chef de file mondial. Notre principal objectif est d'aider les enquêteurs au Canada à identifier les victimes canadiennes, mais nous avons également un rôle international. Lorsqu'un service de police quelque part dans le monde identifie une victime comme étant canadienne, il nous le signale. Nous mettons alors à jour la base de données d'Interpol sur l'exploitation sexuelle des enfants. Cela permet d'éviter de travailler en double et de gagner du temps en faisant savoir aux enquêteurs si des victimes ont déjà été identifiées dans un autre pays.

Nous offrons également divers services d'analyse et de comparaison d'images pour aider les enquêteurs à faire avancer leur travail. Quand une victime est soupçonnée d'être Canadienne, nous demandons l'aide des services de police locaux pour la retrouver et la secourir.

Comment collaborez-vous avec vos partenaires policiers ailleurs dans le monde?

Notre collaboration dépend beaucoup des bases de données et des communications sécurisées. Étant donné la nature de l'analyse requise pour résoudre ce type d'affaires, il est impératif de réunir les spécialistes du domaine au même endroit pour qu'ils puissent travailler ensemble sur des cas compliqués concernant plusieurs pays. Deux fois par an, notre groupe se rend au siège d'Europol à La Haye, aux Pays-Bas, pour rejoindre le Groupe de travail d'identification des victimes, qui s'occupe d'affaires nouvelles et non résolues. Nous collaborons également avec plus de 60 pays ayant accès à la base de données d'Interpol sur l'exploitation sexuelle des enfants, qui permet d'identifier en moyenne sept victimes par jour.

Quelle utilisation faites-vous de la technologie dans votre travail?

La technologie est une nécessité absolue. Auparavant imprimées, les images se retrouvent maintenant sur des plateformes en ligne et leur diffusion peut être exponentielle. Les délinquants utilisent la technologie; nous devons en faire autant et continuellement nous adapter.

Nous avons par ailleurs souvent affaire à une grande quantité de matériel contenant très peu de détails. La technologie que nous utilisons pour analyser rapidement de grandes quantités de matériel et rechercher des indices qui pourraient autrement passer inaperçus nous est très utile pour pouvoir identifier rapidement des victimes. De plus, la technologie sécurisée qui nous permet de collaborer avec des spécialistes en identification des victimes partout dans le monde joue un rôle essentiel dans notre travail.

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez? Comment les surmontez-vous?

Ceux qui enquêtent sur l'exploitation d'enfants portent un lourd fardeau du fait qu'ils sont témoins de ces crimes à répétition et qu'ils ne disposent parfois pas de suffisamment de renseignements pour identifier les victimes. Il y a des enfants au Canada qui, jour et nuit, attendent et prient pour que quelqu'un vienne les sauver. Nous avons le devoir de trouver des technologies qui nous aideront à y arriver.

La notion d'exploitation sexuelle d'enfants (appelée pornographie juvénile dans le Code criminel du Canada) s'applique aux jeunes enfants et même aux bébés. Plus la victime est jeune, moins le crime est susceptible d'être signalé. La police doit composer avec l'évolution de la technologie, l'anonymat que les délinquants réussissent de plus en plus à garder et le nombre sans cesse croissant de plateformes en ligne où les délinquants peuvent attirer un grand nombre de victimes.

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