Vol. 78, Nº 1Entretien

Trois hommes se tiennent derrière un bar.

Un outil citoyen

Un site Web aide les commerçants à lutter contre la petite criminalité

Frustré par les vols régulièrement perpétrés par les clients de son bar à vin, Simon Gordon (à droite) a créé Facewatch en 2010 pour lutter contre la petite criminalité. Crédit : Danielle Wright

Il est difficile de prévenir les délits mineurs... et encore plus de les résoudre. C'est pourquoi Simon Gordon, propriétaire d'entreprise, a créé Facewatch, un site Web britannique qui facilite la communication entre les commerçants, et avec la police locale, pour lutter contre le crime. Amelia Thatcher nous livre les avantages de cet outil, exposés par M. Gordon.

Pourquoi avez-vous créé Facewatch?

J'ai repris le commerce de mon père à Londres, Gordon's Wine Bar, en 2003. Nous nous sommes beaucoup développés dans les années suivantes, mais je ne pouvais pas empêcher les clients de nous voler. Nous essuyions environ 15 vols par mois. J'ai examiné le processus de signalement des crimes et me suis dit :

« C'est fou, c'est tellement inefficace. » Alors, j'ai consulté la police et quelques autres personnes, puis j'ai commencé à travailler sur la plateforme Facewatch en 2010.

Comment est-il utilisé par les commerçants?

C'est avant tout une plateforme de signalement des crimes. On peut créer un profil d'entreprise pour échanger des images de criminels avec certains groupes. Par exemple, les restaurants échangent avec d'autres restaurants, les musées avec les musées, etc. Les commerces sont organisés par secteur et par endroit, parce que la plupart des voleurs de faible envergure sont spécialisés et ont un territoire restreint.

Comment aide-t-il à résoudre un crime?

Disons que vous allez prendre un verre et qu'on vous vole votre sac. Normalement, vous appelez la police ou vous passez au poste de police pour signaler le vol. La police vient ensuite chercher l'enregistrement vidéo des caméras de sécurité en circuit fermé du commerce, puis s'efforce de démasquer le coupable. Cela prend beaucoup de temps. Avec Facewatch, un commerçant peut télécharger l'enregistrement vidéo, préparer un rapport, puis appuyer sur un bouton pour transmettre le tout à la police. Pour endiguer le crime, il faut être rapide, sinon c'est déjà dépassé. Facewatch tient la police au courant.

Vous avez eu recours au financement communautaire pour développer Facewatch. Pourquoi?

Facewatch est un outil citoyen, c'est pour les gens. Je pensais que cela intéresserait les gens, parce que tout le monde est touché par le crime. Tout le monde en parle, et connaît quelqu'un qui s'est fait voler son sac, alors je pensais que ce serait un bon moyen de recueillir des fonds. Nous avons ainsi recueilli près d'un million de livres. Et depuis, nous avons recueilli un autre million auprès d'investisseurs privés.

Quelle est l'ampleur du problème?

Ce qui m'a vraiment surpris, c'est que peu de gens volent, mais ils volent constamment. Par exemple, il y a une femme responsable de 25 délits dans notre système, et ce n'est pas une exception. Alors, si l'on arrête une personne, la minivague de criminalité dans le secteur cesse immédiatement. Les commerçants sont enchantés : la criminalité a chuté de 80 à 90 p. 100 dans certains magasins.

Comment la police l'utilise-t-elle?

Le rôle de la police est d'assurer la sécurité des lieux et, au besoin, de procéder à des arrestations. Ce n'est pas d'aller récolter des enregistrements de caméras vidéo. Il peut s'écouler jusqu'à trois semaines entre le moment où la police recueille une vidéo et celui où elle la visionne. Avec Facewatch, les policiers peuvent la regarder en moins de 10 minutes, alors cela accélère beaucoup le processus. Et le but n'est pas seulement d'emprisonner des tonnes de gens. Ce n'est pas productif. Ce que nous essayons de faire, c'est de prévenir les crimes en voyant comment ils sont exécutés.

Quelle est la réaction des services de police?

Ils adorent! Le système est gratuit pour eux, puisqu'ils fournissent un service. Ils reçoivent cet outil fantastique qui devance de beaucoup leurs propres outils. Et ils n'ont pas besoin d'aller chercher tous ces enregistrements vidéo. C'est un avantage certain pour la police. En fait, certains services de police achètent le système pour des commerces, parce qu'ils veulent qu'ils commencent à l'utiliser. Le prix mensuel pour les commerces est très peu élevé, environ le prix d'une tasse de café.

Quelle est la prochaine étape?

Nous voulons adopter une démarche mondiale dès que possible. Nous permettons aux gens d'échanger de l'information grâce à la plateforme, et offrons des applications à la police et aux commerces. Nous voulons responsabiliser les gens face au crime, pour que chacun s'implique en vue d'y mettre un terme. La police a ses limites, et il est très facile pour nous, commerçants ou simples citoyens, d'endiguer la criminalité simplement en étant plus observateurs.

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