Vol. 77, Nº 2Reportages

Bon sens et humanité

Un projet vise à transformer les soins de santé mentale

Le projet ACCESS appuie le travail que la GRC au N.-B. effectue déjà auprès des jeunes. Crédit : GRC

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Près de 75 p. 100 des Canadiens aux prises avec des troubles de santé mentale ont moins de 25 ans, mais seulement 30 p. 100 d'entre eux cherchent de l'aide.

Malgré les importants progrès qui ont été réalisés en matière de sensibilisation à la santé mentale ces dernières années, la plupart des personnes qui ont le plus besoin de soutien et de soins ne cherchent toujours pas à obtenir de l'aide.

Voilà pourquoi a été créé le projet ACCESS, un projet de recherche échelonné sur cinq ans auquel participent des cliniciens, des jeunes, des familles, des fournisseurs de services communautaires ainsi que la GRC.

Concevoir une stratégie

Il y a deux ans, la Fondation Graham Boeckh et les Instituts de recherche en santé du Canada ont lancé un concours national afin de trouver la meilleure façon de transformer les services de santé mentale. Le projet ACCESS, qui a été soumis principalement par M. Ashok Malla, Ph.D., professeur à l'Université McGill et à l'Institut universitaire en santé mentale Douglas, a été choisi en juin dernier.

Des 55 groupes qui ont soumis des propositions, 17 ont été invités à Montréal (Québec) afin de discuter de leurs idées. M. Malla s'y est rendu et a rencontré l'insp. Rick Shaw de la GRC au Nouveau-Brunswick (N.-B.).

L'insp. Shaw a participé à la conception du programme d'intervention et de déjudiciarisation, qui consistait à rediriger des jeunes de 12 à 17 ans du système de justice criminelle vers des programmes communautaires et a dirigé sa mise en œuvre au N.-B.

« En fait, nous utilisions un outil d'analyse fondé sur des éléments probants pour aider les jeunes, explique l'insp. Shaw. Nous analysions des facteurs de risque liés à leurs activités criminelles, qui étaient en partie attribuables à des problèmes de santé mentale. »

L'insp. Shaw cherchait des moyens d'accroître l'ACCESSibilité des services pour les jeunes ayant des troubles de santé mentale, ce qui a donné lieu à un important partenariat avec le Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse du N.-B.

« Nous savions que la collaboration entre la police, les éducateurs et les fournisseurs de services sociaux et de santé permettrait d'amener davantage les jeunes vers les soins plutôt que vers les tribunaux », ajoute Christian Whalen, du Bureau du défenseur des enfants et de la jeunesse.

L'insp. Shaw et M. Whelan ont donc décidé de faire équipe avec M. Malla et d'autres intervenants et ont mis au point le projet ACCESS.

Accroître l'accès aux soins

Le projet ACCESS vise quatre objectifs : accroître le nombre de jeunes dont on cerne les problèmes de santé mentale, donner à ces derniers un accès facile à des soins dans un délai de 72 heures, continuer d'offrir des soins au-delà de l'âge limite habituel de 18 ans et veiller à ce que les jeunes s'adressent aux spécialistes ou aux fournisseurs de soins primaires qui pourront répondre à leurs besoins.

« J'ai l'impression que nous ajoutons du bon sens et de l'humanité à la façon dont les soins sont offerts, ajoute M. Malla. Au fond, nous accueillons les jeunes et leur ouvrons les bonnes portes. »

Selon l'insp. Shaw, la réussite du projet repose en grande partie sur la collaboration avec l'ensemble des parties intéressées, des organismes partenaires jusqu'aux jeunes en passant par leurs parents. Au N.-B., dans le cadre du projet, on prévoit ouvrir neuf cliniques où les jeunes pourront obtenir facilement des soins au moment où ils en ont besoin.

Les responsables du projet espèrent que les jeunes hésiteront moins à demander de l'aide s'ils peuvent se rendre dans ces endroits sécuritaires.

« Ces cliniques sécuritaires contribuent aussi à la sensibilisation au phénomène, déclare l'insp. Shaw. Grâce à la sensibilisation, un plus grand nombre de jeunes qui ont besoin de soins pourraient être aiguillés par les policiers, les membres de la famille et les amis. Il s'agit d'un changement de culture. »

M. Malla ajoute que l'intervention précoce et le traitement des problèmes de santé mentale dès l'apparition des symptômes peuvent empêcher une maladie mentale de s'aggraver.

Et la négligence de traiter les jeunes ra-pidement entraîne des répercussions directes et indirectes sur la société. Après les accidents, le suicide est la deuxième cause principale de décès chez les jeunes. M. Malla affirme que chaque suicide d'un jeune de 22 ou 23 ans est une perte pour la société dans son ensemble.

« Je crois que nous avons uni nos forces parce que nous estimons que c'est important et que nous aimons avoir une vision globale des choses, conclut-il. Ce n'est pas un rêve, c'est véritablement une vision. Si nous n'essayons pas, nous ne changerons rien. »

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